ARBITRAGE

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Rubrique des Arbitres

 


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Rubriques de Philippe LORMANT - Bridgeur n° 628 - 15 mars 1991

Faites (bien) le mort


Philippe Lormant, arbitre national,
directeur national de l'arbitrage
 


"Si la loi s'applique à tous, elle doit être accessible à chacun"

La présente rubrique n'est pas à proprement parler, une rubrique d'arbitrage, nous n'y abordons pas les cas complexes d'application des lois. Nous avons demandé à Philippe Lormant, lauréat du concours d'arbitrage, de donner aux joueurs quelques conseils quand ils se trouvent confrontés à certaines situations. En particulier, si vous débutez dans la compétition, vous avez intérêt à connaître certaines dispositions du Code, pour ne pas perdre, "sur le tapis vert", des levées que vous auriez gagnées à la table.
 

Faites (bien) le mort

Vous avez eu la courtoisie de laisser votre partenaire négocier un contrat. Certes, on vous dit "mort", mais ne croyez pas l'être totalement, vous gigotez encore !
Halte au feu (si j'ose dire) pas question de faire n'importe quoi. Voici les principales erreurs à éviter :

  1. Le mort ne joue pas
     

Vous le savez, mais il faut souligner qu'il ne doit pas suggérer, même indirectement, une ligne de jeu, en s'étonnant par exemple des manœuvres du déclarant ou en posant une question. Si l'arbitre estime que votre comportement a pu influencer votre partenaire, au préjudice du flanc, vous risquez - le comble pour un mort ! - la peine capitale sous forme de marque ajustée.

  1. Il ne pose pas de questions
     

Je sais bien que si votre partenaire cherche à capturer la Dame de Pique, vous n'allez pas demander à Ouest :
" Vous avez bien ouvert d'1 ? ".
Même mort, vous avez du savoir-vivre ! Mais sachez que vous ne devez pas, non plus, et pendant toute la durée du jeu de la carte, demander le rappel des enchères, même d'une façon générale (sans spécifier une couleur). Là encore, l'arbitre pourrait estimer qu'il y a une suggestion de jeu.

  1. Il ne signale pas une irrégularité et il n'appelle pas l'arbitre
     

J'ai eu l'occasion de constater que ce point du règlement était peu connu des joueurs. Attentif, vous admirez la virtuosité de votre partenaire à la carte, quand vous vous apercevez qu'un adversaire a commis une renonce. Faites le mort ! Appeler l'arbitre ou signaler au déclarant cette renonce avant la fin du coup pourrait vous faire perdre tout droit à réparation (levées de transfert !).

Attendez la fin du jeu de la carte.

Alors, mais alors seulement, vous avez le droit de signaler toute irrégularité de jeu constatée.

En revanche, tout mort que vous soyez, vous pouvez et parfois devez :

  1. Tenir le compte des levées

Evident, mais pouvez-vous répondre au déclarant qui vous demande combien de levées il a réalisées ? A mon avis, oui, dès lors que vous vous abstenez de tout commentaire tels que : 8 et c'est fermé, ou "6 :3 à Pique, 2 à Cœur et l'As de Carreau".

  1. "PAS DE...", partenaire ?

Oui, vous pouvez demander au déclarant qui défausse " Pas de... partenaire" mais au déclarant seulement et en aucun cas à l'un des joueurs du flanc.
Ce droit est important, car votre partenaire pourra corriger son erreur sans pénalité.

  1. Corriger un rappel erroné des enchères

Si n'importe quel joueur a demandé le rappel des enchères, en principe à son premier tour de jouer, vous devez corriger toute erreur commise dans ce rappel (y compris l'omission d'une alerte), mais abstenez-vous de tout autre commentaire.

  1. Empêcher le déclarant de jouer de la mauvaise main

Vous voyez que votre partenaire va jouer du mort quand il est en main : vous avez le droit de le prévenir. Si l'erreur est commise, c'est-à-dire s'il a déjà joué, vous n'avez pas le droit de signaler cette irrégularité. Le feriez-vous que l'erreur serait consommée et que le camp adverse aurait le droit de choisir de quelle main le déclarant serait forcé de jouer.

Au total, vous constatez que les droits du mort sont assez limités. Les interdictions sont plus importantes et, de surcroît, si vous avez cédé à l'idée saugrenue d'échanger votre jeu avec le déclarant, ou si vous avez regardé l'une des mains du flanc ou si, venant vous placer derrière votre partenaire, vous avez contemplé son jeu, ces maigres droits risquent de vous être retirés !

Condoléances, mais le top que votre partenaire allait peut-être prendre à la carte, peut, par votre action intempestive, être relégué au chapitre des regrets éternels !

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